La robotique pédagogique au service de l’apprentissage de la programmation : une charge cognitive trop élevée pour des élèves de cycle 3 ?
Résumé
Contexte :
L’apprentissage de la programmation informatique a progressivement réintégré les cursus scolaires (Bocconi et al., 2016), notamment grâce à l’apparition des logiciels éducatifs de programmation tels que Scratch (Resnick et al., 2009), dans l’optique de permettre le développement de la pensée informatique, une manière particulière de résoudre des problèmes qui s’appuient sur des concepts issus de l’informatique (Wing, 2006). La robotique pédagogique semble présenter un certain potentiel pour faciliter l’acquisition des notions et compétences en programmation (Ching & Hsu, 2023 ; Zhang et al., 2021). Cependant, dans une expérience comparative précédente, nous avons observé que les élèves (de niveau CM2) étaient moins performants dans leurs apprentissages lorsque le logiciel Scratch était associé à un robot pédagogique Thymio, en comparaison avec une situation dans laquelle des élèves utilisaient Scratch sans robot. En nous appuyant sur la Théorie de la charge cognitive (Sweller et al., 2019), nous avons émis l’hypothèse que l’association entre un logiciel éducatif de programmation et un robot pédagogique représentait une charge cognitive, notamment extrinsèque, trop élevée pour des élèves de cycle 3.
Méthode :
Nous avons recruté 116 élèves de CM2 (63 filles) qui ont participé à notre expérience. Dans chaque classe, la moitié des élèves a suivi la séance sur Scratch sans robot, alors que l’autre moitié travaillait sur Scratch associé au robot pédagogique Thymio. Deux séances de programmation ont été mises en place (environ 1h30). Les concepts, compétences et activités développés au cours de ces séances étaient identiques dans les deux groupes. Nous avons mesuré la charge cognitive à l’aide d’une échelle de mesure subjective auto-rapportée, évaluation souvent considérée comme la plus fiable et pratique à mettre en place (Ayres, 2006 ; Chen et al., 2011). L’échelle de Klepsch et al. (2017) a été traduite et adaptée au public d’élèves de CM2 pour cette étude. L’échelle de Paas (1992) a été mise à contribution pour évaluer l’effort mental subjectif pendant la tâche, également révélateur du niveau de charge cognitive.
Résultats :
Nos résultats témoignent d’une augmentation de la charge cognitive globale et de l’effort mental subjectif dans la condition Scratch + Robot, en comparaison avec la condition Scratch sans robot (respectivement, F(1, 111) = 8.02, p < .01 et F(1, 114) = 13.72, p < .001), conformément à notre hypothèse. Le seul type de charge cognitive qui est impacté par notre dispositif expérimental est la charge cognitive extrinsèque (F(1, 111) = 7.40, p < .01).
Conclusion :
Notre étude met en lumière une charge cognitive extrinsèque plus élevée lorsque les élèves de CM2 utilisent le logiciel Scratch associé à un robot pédagogique. La charge extrinsèque correspond à toutes les informations à prendre en compte qui sont inutiles aux apprentissages (Sweller et al., 2019). Cette augmentation est probablement causée par la nécessité de maîtriser certains aspects techniques essentiels, propres à la manipulation du robot associé au logiciel. Ces résultats pourraient ainsi potentiellement expliquer pourquoi les performances d’apprentissage des élèves en condition Scratch + Robot peuvent être plus faibles que celles des élèves n’utilisant pas les robots.
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