Lorsque le développement perd le Nord ! Courbes de Kuznets Environnementales : l'apport des indicateurs alternatifs de type empreinte écologique dans la réflexion sur le développement durable
Abstract
Juin 1992, Rio de Janeiro. Alors que les chefs d'Etat et de gouvernement du monde entier s'apprêtent à dénoncer l'impact néfaste des modes de développement sur l'environnement, un coup de tonnerre médiatique retentit soudainement dans les coulisses du Sommet de la Terre. Surgis d'on ne sait où, des centaines de scientifiques remettent en cause avec virulence le contenu des textes de la Conférence, soupçonnés de reposer sur des « arguments pseudo-scientifiques » et des « préjugés irrationnels 1». L'appel d'Heidelberg a ainsi marqué le renouveau d'une littérature visant à démontrer (de manière scientifique et rationnelle, cette fois-ci) l'hypothèse inverse de celle émise par le Club de Rome au début des années 1970 : à savoir que le développement et la croissance seraient finalement les meilleurs moyens de parvenir à améliorer l'état de l'environnement. Le présent article fait d'abord un point sur ces débats à partir de la littérature traitant de l'hypothèse des Courbes de Kuznets Environnementales (CKE). Après avoir regroupé les principales critiques dont les CKE font régulièrement l'objet (indicateurs environnementaux trop partiels, indicateurs de développement trop limités, 1)), nous proposons une formulation nouvelle de cette hypothèse en utilisant deux indicateurs synthétiques que sont l'Empreinte écologique et l'Indicateur de Développement Humain (IDH) (2.). Les conclusions que nous en tirons (3.) contredisent l'hypothèse des CKE et font apparaître un phénomène pernicieux : tandis que les pays du Nord « améliorent » la qualité de leur cadre de vie, ils continuent de consommer davantage de ressources... provenant pour partie des pays du Sud !